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Sportbreizh, pour le dynamisme du vélo breton
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          • Quelle est la personne qui s’intéresse un peu au vélo et qui n’a jamais entendu parler un jour de l’ACBB, plus précisément la section cycliste de l’Athlétic Club de Boulogne-Billancourt ? Personne ne lève le doigt ? Ruban Granitier Breton, Tro Bro Leon, Manche Atlantique, les coureurs du club parisien avaient dans un passé pas encore si lointain l’habitude de faire la course en tête sur les épreuves bretonnes. Son effectif a été régulièrement composé de coureurs bretons. Sportbreizh a décidé de vous raconter la fabuleuse histoire du club le plus titré de France, sans doute d’Europe et probablement de la planète. Une histoire unique dans le vélo qui prend naissance il y a près d’un siècle et qui se poursuit.
          • Sous les couleurs de l’ACBB: Bienvenue dans un club cycliste pas comme les autres ! 1/7
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            Le rendez-vous est fixé à Issy-les-Moulineaux au Restaurant du Stade de Serge et Claire Rebondy qui en plus d’y tenir une excellente table, ont transformé le lieu en un petit musée du sport où le cyclisme est omniprésent. Emmanuel Dehan arrive, portant une caisse de déménagement remplie de classeurs. « Des classeurs comme celui-là sur l’ACBB, j’en ai encore quelques dizaines chez moi », sourit cet ancien coureur qui se passionne depuis des années pour l’histoire du célèbre club francilien. Si les résultats aujourd’hui ne sont plus à la hauteur de ce qu’ils étaient au siècle dernier, il y a néanmoins de fortes chances que le palmarès accumulé depuis 1924 à aujourd’hui ne soit pas prêt d’être égalé par un autre club cycliste affilié à L’Union Cycliste Internationale. Plus de 12 000 victoires à ce jour, 117 titres de champion de France, treize titres de champion de monde, huit médailles olympiques dont trois en or et huit tours de France ! « Au-delà du palmarès prestigieux de ce club et de tous les illustres coureurs qui y ont été licenciés, son histoire est particulière parce qu’elle retrace l’évolution d’un siècle de sport cycliste, de l’âge d’or de la piste entre les deux guerres jusqu’à l’internationalisation du peloton professionnel aujourd’hui », analyse Emmanuel Déhan.

             

            Le pistard Louis « Toto » Gérardin

             

            Comme toute épopée, celle de la section cycliste de l’Athlétic Club de Boulogne-Billancourt repose sur quelques personnes qui écriront, au cours des décennies, l’histoire de ce club exceptionnel. Le premier par ordre chronologique fut un pur produit local, répondant au surnom de « toto », né à Billancourt en 1912, douze ans avant la création de l’ACBB. Le cyclisme parisien s’illustre à l’époque sur les pistes, notamment sur vélodrome du Parc des Princes, sur l’anneau de Vincennes, aujourd’hui rebaptisé piste de la Cipale, mais surtout dans l’antre du Boulevard de Grenelle, le Vel d’hiv, temple du vélo de 17 000 places inauguré en 1910.

            «  Les classes populaires s’entassaient dans les gradins et le tout-Paris dînait au centre du vélodrome. »

            Louis « Toto » Gérardin est chez lui au vélodrome d’hiver depuis qu’à 17 ans il est devenu champion de vitesse de Paris. L’année suivante en 1930, il est couronné champion du monde amateur à Bruxelles avant de passer pro dès 1931. Gérardin ne desserrera ses cale-pieds de coureur qu’après son 12ème titre de champion de France en…1953. « La première vraie équipe de haut-niveau de l’ACBB était composée de pistards. La popularité du vélo à l’époque était sur la piste et notamment lors des six jours de Paris au Vel d’Hiv. Les classes populaires s’entassaient dans les gradins et le tout-Paris dînait dans le restaurant aménagé au centre du vélodrome », explique Emmanuel Dehan. Et il n’y a pas que le tout Paris qui se précipite au Vel d’Hiv, Ernest Hemingway est un habitué des nuits du lieu et de « sa lumière fumeuse ». L’écrivain américain l’évoque dans son roman Paris est une fête, paru à titre posthume en 1964.

             

            Le Vel d’Hiv pendant les six jours de Paris. Les classes populaires s’entassent dans les gradins et au centre de la piste, les tables de restaurant attendent leurs invités de marque. (collection E. Dehan)

             

            Le spectacle est sur l’anneau de bois mais aussi sur la scène où se produisent la Houppa, une chanteuse très populaire d’entre les deux guerres, puis Yvette Horner et son accordéon dans les années d’après guerre, puis Edith Piaf, qui, après la mort accidentelle de Marcel Cerdan, essaie de se consoler dans les bras de « Toto » qui met fin à la liaison au bout de quelques semaines en 1952. Ainsi s’écrivirent les premières lettres d’or du cyclisme sur piste de l’Association Cycliste de Boulogne Billancourt qui en 1943, sous l’occupation, devient la section cycliste de l’Athlétic Club de Boulogne-Billancourt.

             

            Toto Géradin (à droite) et Lucien Michard (à gauche) règnent sur les pistes parisiennes et mondiales pendant l’entre deux-guerres (collection E. Dehan)

             

            Le tandem Mickey Wiégant et Philippe Potin

             

            Au lendemain du deuxième conflit mondial au fur et à mesure de la reconstruction du pays, les courses sur route reprennent leurs droits et la section route de l’ACBB a fort à faire face aux autres clubs parisiens et notamment face au club voisin, le Vélo Club Levallois. L’un de ses anciens coureurs amateurs Mickey Wiégant, en rupture de ban avec ses dirigeants valloisiens, propose alors au club boulonnais de monter une formation sur route de haut niveau. Le club commence à recruter les bons coureurs parisiens, mais il reste à trouver le nerf de la guerre, l’argent pour financer les ambitions affichées. Un certain Philippe Potin, très impliqué dans le club omnisport et président de la section de hockey-sur-glace va l’y aider. Et l’homme a de la ressource. Il est l’héritier de la chaîne française des magasins d’alimentation Félix Potin.

             

            Joseph Groussard coureur professionnel à l’ACBB aux côtés de son directeur sportif. Paul « Mickey » Wiégant. (Collection E. Dehan)

             

            Anquetil gagne trois tours de France

             

            Mickey Wiégant recrute, Philippe Potin paie. Au milieu des années 50, l’ACBB a réussi à attirer une trentaine de coureurs parmi les meilleurs de l’hexagone. « Le club compta même deux équipes professionnelles, une première sous le nom de la marque de cycles Helyett-Félix Potin-Leroux (La chicorée).

             

            « C’était comme si aujourd’hui, dans une même structure, vous retrouviez les coureurs de la Sky et ceux d’Astana. »

             

            Un second groupe extra-sportif, comme on les appelait à l’époque, courait sous une autre marque de cycles, Essor associée au fabricant de pneumatiques Hutchinson. Il arrivait souvent que les coureurs passent d’une équipe à l’autre. C’était comme si aujourd’hui, dans une même structure, vous retrouviez les coureurs de la Sky et ceux d’Astana. Ils raflaient toutes les grandes courses », poursuit Emmanuel Dehan.

             

            Dans les années 50, l’ACBB possède deux équipes professionnelles, Helyett-Leroux et Essor-Hutchinson. Ici avec Mickey Wiégant (deuxième à Gauche) et Felix Potin de sponsor à droite. (Collection E. Dehan).

             

            Jacques Anquetil, les frères Darrigade, Jean Stablinsky, l’irlandais Seamus Elliot, Jean Graczyk et un breton de Fougères, Joseph Groussard, courent pour Helyett. D’autres coureurs de renom comme Roger Hassenforder, Louis Caput, Jean Forestier portent la tunique Essor. Les deux maillots aux marques distinctives ont en commun de porter le liseret orange et gris des couleurs du club parisien. Entre 1957 et 1962, les coursiers de l’ACBB font la pluie et le beau temps dans un peloton professionnel quasi-exclusivement européen et alimentent l’équipe nationale et les sélections régionales en vue du Tour de France. Anquetil gagne trois grandes boucles et un Giro.

             

            L’équipe de l’ACBB rebaptisée Fynsec, lorsqu’elle se déplace en Italie. Entourant la charmante dame, les deux leaders, André Darrigade et Jacques Anquetil. (Collection E. Dehan)

             

            La fin du professionnalisme

             

            Cependant, l’année 1962 marque la fin de l’épopée professionnelle de l’ACBB. L’arrivée des équipes de marques dans le Tour de France a rebattu les cartes. Exit la chicorée Leroux. Les établissements Félix Potin en déclin ont été vendus dès 1958 à un richissime homme d’affaire d’origine grecque. « Philippe Potin, né avec une cuillère en argent dans la bouche va connaître alors un triste destin, ayant dilapidé toute sa fortune », poursuit Emmanuel Dehan.

            L’équipe est rebaptisée St Raphaël-Helyett-Hutchinson. Depuis une saison André Darrigade est parti. L’allemand Rudy Altig est arrivé. Mickey Wiégant dirige toujours l’équipe mais s’est vu attribuer un adjoint, un loup dans la bergerie, en la personne de Raphaël Géminiani. Le début de la saison est laborieux et Mickey Wiégant en paie le prix fort. Evincé, il est remplacé par Géminiani. Le Tour de France est cependant un triomphe pour l’équipe avec la troisième victoire d’Anquetil, le classement par points pour Altig et treize victoires d’étapes.

            Avec ce retour aux équipes de marques dans le Tour, les sponsors de plus en plus omniprésents s’affranchissent des clubs. Mickey Wiégant décide alors de réorienter la politique sportive de l’ACBB. Le club parisien se donne désormais pour mission de faire éclore les talents au plus haut niveau amateur et les aider à passer professionnel et cela va marcher pendant…40 ans !

            Albert LE ROUX

             


             

            Emmanuel Déhan, Vélo passion !

             
             
            Lorsqu’il ne travaille pas (il est cadre dirigeant d’un groupe industriel international spécialisé dans le gaz), Emmanuel Déhan rencontre les anciens champions et fréquente les salles de ventes à la recherche de pièces de collection du cyclisme du XXe siècle. Maillots, vélos, casquettes, livres, coupures de presse, etc, tout l’intéresse. Il organise ainsi régulièrement des expositions. Depuis quelques années également, il sillonne les routes de France, de temps en temps sur son vélo, mais plus souvent au volant de sa voiture pour rendre visite à d’anciens coureurs passés par l’ACBB. Ce passionné a entrepris un énorme travail de recherche sur l’histoire du club parisien et s’est donné pour mission de publier un ouvrage très complet en 2024, l’année du centenaire du club. Recherches documentaires dans les archives municipales de Boulogne-Billancourt, dans la presse de l’époque, à la Bibliothèque Nationale de France, documents gentiment cédés par la famille Wiégant, l’aident à reconstituer le fil de cette épopée cycliste hors du commun.
             
            Sous les couleurs de l’ACBB: Bienvenue dans un club cycliste pas comme les autres ! 1/7
             
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            Restent les témoignages des coureurs. Les plus âgés ont pris l’échappée belle mais bien d’autres sont encore de ce monde et restent les témoins vivants d’un cyclisme disparu. « Pour le moment j’ai rencontré environ 80 coureurs. Il doit y en avoir encore entre 300 et 400 », explique Emmanuel qui s’adonne à un vrai travail de fourmi pour retrouver les coordonnées de ces anciens coursiers. Alors si vous en connaissez autour de vous, n’hésitez pas à nous le faire savoir, nous lui transmettrons leurs coordonnées.
             
            Contact: redaction@sportbreizh.com
             

             

            Les Leroy de père en fils

             

            Si l’ACBB est devenu ce club incomparable par son palmarès, c’est bien entendu en raison d’un directeur sportif exceptionnel, Paul « Mickey » Wiégant. Mais dans l’ombre, une famille originaire du Loiret, les Leroy, a toujours veillé à la bonne marche du club. Et ce depuis sa fondation en 1924 ! Elle tient un magasin de cycles dénommé La Gazelle au 47 boulevard Jean Jaurès à Boulogne-Billancourt. L’auteur de ces lignes avait bien repéré cette enseigne voilà quelques années. « Tiens, un distributeur de la marque de cycles hollandaise ici à Paris ? », avais-je pensé. Ce constructeur équipa quelques formations professionnelles comme Frisol dans les années 70, ou encore Daf-Trucks dans les années 80 et TVM dans les années 90. Mais ce constructeur est surtout réputé pour ses fabrications de vélos urbains. Alors rien de très surprenant qu’il ait un distributeur en région parisienne. Tout faux ! Et voici encore une histoire incroyable, liée à l’épopée de l’ACBB.

             

            Les cycles La Gazelle à Boulogne-Billancourt appartenant à la famille Leroy depuis quatre générations, une famille qui veille aussi sur le club de l’ACBB depuis trois générations. (Albert Le Roux)

             

            Dès 1906, une échoppe de vélos ouvre à cet endroit qui ne s’appelle pas le boulevard Jean Jaurès, puisqu’à l’époque le député et fondateur du quotidien L’Humanité n’avait pas encore été assassiné. Le propriétaire en plus de son atelier possède une activité de paris hippiques. Le téléphone n’en est qu’à ses débuts, les paris en ligne, ce sera un siècle plus tard, alors c’est le jeune apprenti de l’atelier qui, plusieurs fois par jour, enfourche son vélo pour aller porter les pronostics des clients jusqu’aux hippodromes de Longchamp et d’Auteuil. « Vu ses multiples allers-retours dans la journée, il n’était pas bien épais. Les clients du magasin le surnommèrent La Gazelle. C’était mon grand-père, Fernand Leroy », explique Philippe Leroy, actuel président de la section cycliste de l’ACBB.

            « Lorsque la 1e guerre mondiale débuta, le propriétaire et mon grand-père furent mobilisés. Et son patron lui promit que si tous les deux revenaient vivants de cette boucherie, il lui céderait gratuitement la boutique. Ce qu’il fit. Mon grand-père donna son surnom au magasin », poursuit Philippe Leroy. Fernand Leroy deviendra dirigeant de l’ACBB. Le club aura même son siège dans l’arrière-boutique pendant de nombreuses années. Son fils Gérard, père de Philippe, en plus de son travail à l’atelier, fut dans les années 50 mécanicien des équipes cyclistes professionnelles de l’ACBB. Il deviendra ensuite dirigeant puis président de la section cycliste. Dans les années 80, Gérard cède à son tour son affaire à son fils Philippe qui prendra la présidence du club en 1997. Aujourd’hui le passage de témoin du magasin est assuré par son fils Nicolas (quatrième génération !) et c’est reparti ! Pour un… siècle ?

             

            Philippe Leroy et son fils Nicolas dans le magasin familial qui fut pendant longtemps le siège de l’ACBB. (Albert Le Roux)

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